drama king. (marlon)

Pretty face, dark soul.



La vie est une pièce de théâtre à ciel ouvert, dans laquelle il détient bien évidemment le premier rôle, sous le feu des projecteurs aussi longtemps que possible. L'enfant inattendu, nullement prévu, pourtant devenu tout aussi rapidement le petit chouchou. Mère conciliante avec lui, parfois trop, cédant à la plupart de ses caprices faute de savoir dire non à sa mine boudeuse des plus rôdées. L'allure angélique face aux deux sœurs ainées, avec lesquelles le gouffre de six années n'arrange pas les choses, jalousie ajoutant un arrière-goût amer à leurs relations. Il suffit de chouiner un peu, pour les rendre fautives d'une connerie faite par lui-même, innocence revêtue telle une seconde peau.

Enfin, ça n'a pas toujours fonctionné. Pas le jour où son père lui a foutu une tarte, ayant vu clair dans son petit jeu, difficilement bernable. En même temps il sait exclusivement s'exprimer comme ça, l'adulte, avec les claques. Maladresse des mots et de leurs expressions. Le même dissimulant à peine son aversion envers son dernier enfant, désintérêt ayant pour seul effet d'accentuer les tentatives du gamin pour capter son attention. Puis un jour, soudainement, le père a complètement disparu de la circulation. Raison tout aussi brusquement donnée par sa mère: il est en prison. Pourquoi, comment ? Réponses données bien des années après, seulement.

Alors le gamin maquille au mieux la laide réalité, de son imagination réécrivant de toutes pièces les fais, pour mieux expliquer l'absence du père. Reparti au Mexique pour aller voir la famille, il a trouvé un meilleur job là-bas et bientôt, ils iront le rejoindre. Ou il reviendra après avoir économisé. Adulte presque idolâtré, mensonge pour mieux le mettre sur un piédestal. Il ne le mérite pourtant pas.



Les années filent, défilent, au gré du temps passant. Pas toujours simple pour l'adolescent, d'habiter désormais seul avec sa mère, adulte sur son dos bien trop souvent à son goût. Temps bien plus souvent passé à l'extérieur du domicile familial qu'en son sein, à traîner ça et là par distraction. Pas toujours avec de bonnes fréquentations, mais les planches du théâtre restent sa seconde maison. Spectacles d'enfants troqués contre les multitudes de textes à retenir, quitte à y mettre toute son âme.

Passion devenant une évidence pour un potentiel futur. Qu'importe l'avis de ses ascendants, et du père tout juste sorti de taule, sur le fait qu'être comédien ne pourrait être décemment un "vrai métier". Prêt à défendre de son âme cette passion chronophage lui valant louanges et attention, au prix de cris et portes claquées. Rare soutien étonnamment trouvé auprès des sœurs ainées, celles prenant le temps de venir à chacune des représentations données par le club de théâtre du lycée.

Jusqu'à ce maudit drame.

La nouvelle, celle d'un accident de voiture subi par l'aînée sur le chemin du  théâtre, parvient aux oreilles de l'adolescent quelques minutes avant d'entrer sur scène. Pas le choix, il faut revêtir le rôle tant travaillé pour ne pas laisser le groupe en plan, inquiétude en fond sonore durant toute l'heure suivante. La funeste nouvelle ne lui sera révélée deux heures après, par les larmes de l'autre sœur ainée venant de perdre sa jumelle.

Il aura suffit de ça, pour disloquer leur famille déjà bancale à souhait.
Une perte, et le père prenant la poudre d'escampette.
La mère se noyant dans le chagrin.
La sœur s'oubliant à travers les substances en bonbons empoisonnés.
Et lui, maintenant à bout de bras ces deux fragments disloqués.
Quitte à s'en effondrer, s'il le faut.