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every god I pray to only leads me back to you (ryter)

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Russett Harding
Russett Harding

Messages :  454
Pseudo :  kidd, she/her.
Faceclaim :  oliver jackson cohen.
Crédits :  av ⋅ mooncalf, gifs ⋅ jensens-ackles.
Selfie :  every god I pray to only leads me back to you (ryter) - Page 2 928959dbebe11b58c4ee4e3a4b4a8a49cf6c2e6b
Citation :  — sir clingy mcteary
i will love you when you are a still day.
i will love you when you are a hurricane.

Âge :  thirty four.
Pronom :  he/him.
Statut Civil :  single, desperately in love with his best friend.
Occupation :  poet, photographer, drawer. more effectively, freelance columnist for an independent online magazine about art, culture and society, and illustrator for some of joyce's authors.
Habitation :  a one-bed flat in angel, just above an off-licence (islington).
In game :  disponible ⋅ troisième personne du singulier ⋅ longueur aléatoire mais le plus souvent réponses courtes pour faire avancer l'action ⋅ rp en français + dialogues en anglais (adaptable) ⋅ réponse sans ordre précis.

(hunter, lily, ivy, nehara, francis, joyce, dulcie)

Triggers :  tant que ça n'est pas du sensationnalisme et que les sujets sont abordés avec respect, je peux à peu près tout lire.
Warnings :  pression familiale ⋅ mommy issues ⋅ dépression ⋅ anxiété ⋅ potentiel usage d'un langage vulgaire ⋅ référence (non graphique) à la sexualité.

   
— back to you


And all I really asked of you, is just to tell me what we're going through. But every God I pray to only leads me back to you. And I'm so broken now it's not worth healing.

TW/CW : ràs?

Chaque proposition de Hunter se solde immanquablement par un oui enthousiaste, couronné d’un regard brillant. La moindre excuse pour faire perdurer le temps passé ensemble est attrapée au vol, d’une poigne plus ferme qu’elle ne l’a jamais été par le passé. Rye ne veut rien laisser lui échapper, contrairement à toutes ces fois où il n’a pas été capable de retenir les opportunités qui lui étaient offertes. Bien trop souvent, il s’est défilé, se noyant dans sa propre lâcheté, perdant une à une les chances qu’on lui jetait à la figure de changer un minimum le cours de son existence. Il n’avait jamais vu les signes qu’on lui donnait, aussi aveugle qu’un singe aux mains posées sur sa mire, s’embourbant dans son propre malheur. C’en est assez. Retrouver Hunter sur une application idiote, c’était l’un de ces signes en question ; un hasard (du nom de Lily Wayne) qui les a réunis au détour d’une route, un samedi matin, pour les amener jusqu’aux abords de falaises, les silences confortables bercés par le bruit des vagues s’écrasant sur la roche, des mètres en dessous de leurs pieds. Les éclats de voix de ce matin ont naturellement laissé place à ceux de leurs rires, les enrobant d’une nostalgie douce d’une époque où Rye avait l’impression d’être un des maîtres du temps, pouvant l’étirer à l’infini dans l’unique but de faire perdurer les instants qu’ils partageaient. Les heures qui s’écoulent immanquablement lui donnent l’impression de retrouver une part de ça. Leur complicité renaît au détour des blagues et des remarques taquines, de la commémoration d’une partie de ces milliers – millions? – de souvenirs créés ensemble, à mesure qu’ils en tissent de nouveaux auxquels Rye se raccrochera avec cette ardeur qu’on ne lui a que trop rarement connue. Au fond, il s’en fout bien, de cet énième détour qu’Hunter propose de prendre. Il s’en fout de savoir que ses pieds commencent à souffrir, que le podomètre de sa montre surchauffe, que son dos se tapisse d’un film de sueur à en coller son t-shirt à sa peau. Oui, il veut voir ce petit chemin qui ne les mènera peut-être nulle part. Oui, évidemment que The Beachy Head Story Museum est soudainement la chose la plus intéressante qui lui ait été donnée de voir. Chaque photo, chaque objet attire son attention pendant des secondes qui s’étirent sans cesse en minutes, gonflant le temps de visite d’un musée si petit qu’il n’aurait pas dû prendre une heure à être parcouru. A peine sortent-ils du musée que Rye est bien incapable de se rappeler de l’exposition à laquelle ils ont assisté. Seuls les rires perdurent, et les mimiques exagérées d’un Hunter s’amusant à reproduire les expressions des anonymes – du moins, le sont-ils restés pour eux – sur les photos ou les postures des quelques statues, arrachant des esclaffements à en pleurer au journaliste.

Il se raccrochera à ces souvenirs. Aux photos qu’il a pu prendre pendant leur périple ; des paysages, de la mer, des maisons colorées, mais aussi celles prises à la dérobée des sourires étirant les lèvres d’Hunter, de cet éclat dans son regard malmenant les battements de coeur de Harding, de ses froncements de sourcils lorsqu’il se concentre pour lire la carte. “Yes, I’m taking pictures, don’t start complaining. You’ll thank me when you’re grey and old and your poor memory plays tricks on you.” D’un regard appuyé, il s’est affirmé, faisant clairement comprendre à Wayne qu’il n’accepterait pas la moindre négociation quant au contenu de sa pellicule. Tout ça, c’est devenu trop rare pour se perdre dans les limbes de sa mémoire. Prendre le risque d’oublier à quoi ressemblent les traits de celui qui lui a tant manqué, un soir de novembre, dans la lumière d’un coucher de soleil sur le littoral, lui paraît insensé. Encore plus lorsque leurs pieds les ramènent finalement vers la Defender et qu’un poids vient douloureusement écraser sa poitrine. Le claquement de la portière étouffe le soupir qu’il n’arrive plus à retenir. Dans l’habitacle, les conversations animées laissent place au silence pesant, bien plus désagréable que celui dans lequel ils ont pu se complaire parfois, durant l’après-midi. Nerveusement, Rye commence à jouer avec ses doigts, les trifouillant en cherchant le courage d’exprimer le fond de sa pensée. I don’t wanna go home. Qu’est-ce qu’il se passera, une fois de retour à Londres? Il ne veut pas se contenter de cette journée passée à ses côtés. Il ne veut pas simplement ressasser toutes les émotions qui l’ont traversé, depuis six heures ce matin jusqu’à maintenant. L’angoisse lui tord le ventre à l’incertitude de ce qui les attend une fois la capitale retrouvée, entre sa peur de foirer à nouveau et son besoin de le garder dans sa vie, maintenant qu’il y a fait un nouveau pas. D’avoir passé des heures et des heures à ses côtés lui fait réaliser à quel point ces deux dernières années ont pu avoir quelque chose de traumatique, à quel point cette idée à la con de garder ses distances a pu lui faire du mal, leur faire du mal, et ô combien il ne peut se résoudre à replonger dans cette absence. Kilomètre après kilomètre, Rye sent son sourire fondre en une moue préoccupée, s’accentuant lorsque la voiture bifurque soudainement. Silencieusement, il détaille Hunter et son incertitude et, à l’annonce de la décision du conducteur, l’artiste esquisse un sourire rassuré. “Fine by me, yeah,” il souffle, parce que n’importe quel nombre d’heures grappillées parvient à soulever un peu de son anxiété.

Ses joues rouges ne parviennent pas à retrouver leur couleur initiale avant qu’Hunter ne glisse la clé dans la serrure de la chambre. Les sourcils arqués du réceptionniste et le rictus de l’athlète ne quittent pas son esprit, nourrissant cette gêne qui le malmène au point qu’il n’adresse qu’un bref regard à la pièce s’ouvrant devant eux avant de lâcher son sac et de le laisser tomber contre le fauteuil, grognant légèrement à la libération de son dos. Les bras tendus au-dessus de sa tête, Rye s’étire et croise le regard de Wayne, faisant naître une nouvelle vague de rouge lui montant jusqu’au bout des oreilles. What an absolute idiot I am, se répète-t-il, revivant inlassablement la scène de son aveu maladroit face au réceptionniste les soutenant qu’il ne restait qu’une seule et unique chambre libre dans l’établissement, malgré un parking peu rempli et une série de clés accrochées dans son dos. It’s fine! We’ve slept together before anyway. Harding a beau aimé les mots, il met parfois du temps à comprendre leur teneur réelle lorsqu’ils passent la barrière de ses lèvres, ne saisissant les subtilités de ses propres paroles que face aux réactions étonnées qui lui font face. Les souvenirs de leur nuit passée ensemble remontent à la surface et créent un tourbillon dans son estomac. Les sensations fantômes se diffusent sous sa peau, provoquant une déferlante de frissons et une chair de poule dissimulée par les manches de son pull. Il soupire doucement, se laisse tomber sur le fauteuil, se demandant s’il sera en mesure de survivre à leur proximité durant la nuit, tout en sachant qu’il sera incapable de s’en passer.

Rye relève la tête en entendant la voix de l’athlète. Pour la première fois depuis qu’ils ont mis les pieds dans la chambre, il prend plus de quelques secondes pour le regarder, détaillant ses traits tirés sous l’éclairage du lustre. La fatigue n’attaque en rien la beauté de son visage. Sa mâchoire carrée, ses yeux clairs, ses sourcils broussailleux, ses lèvres charnues… Rye a écrit bien des vers sur ce faciès. Des pages et des pages noircies par son admiration et sa dévotion sourde, jamais transcrite ailleurs que sur les lignes froissées de ses carnets amassés à côté de son canapé, en une table d’appoint improvisée. De son encre noire, il a décrit la couleur singulière de ses iris. Avec ses sourcils froncés, la mimique avec laquelle les commissures de ses lèvres s’étirent d’un sourire à un autre. Hunter Wayne est une source d’inspiration inépuisable aux yeux du poète et ce week-end passé près de lui ne calmera en rien les ardeurs créatives d’Harding, qui acquiesce légèrement à sa question, cachant sa déglutition en baissant la tête. Alors qu’il attrape son téléphone, il s’étrangle de rire à la remarque sur la gastronomie française, étouffé contre sa paume. “I heard they also eat frog legs. Freaking savages, right?” L’accent sur l’évocation de l’amphibien lui arrache un sourire taquin, lançant un regard vers Hunter à travers ses cils. L’amusement grandit un peu plus jusqu’à ce que Rye se retrouve à cligner des yeux, se plongeant dans le silence pendant une seconde ou deux, avant d’éclater de rire à l’évocation de son ex petit-ami. Rien de ce qu’il s’est passé aujourd’hui n’aurait pu être prévu, mais la mention de Ben est probablement la cerise sur un gâteau d’inattendus. En écho au geste de Hunter, et sans même s’en rendre compte, Rye se met à secouer la tête. “It’s crazy how your rivalry can be more epic than anything I’ve lived with him.” Les souvenirs de sa relation avec Ben sont, au mieux, doucereux, au pire, synonyme de certains traumatismes qu’il peine encore à considérer comme tels. Un amas informe de restes dont il ne parvient pas à se détacher, entre incertitudes profondes et manque de confiance envers lui-même comme envers ceux capables de lui montrer le moindre attrait. Sauf Hunter. La porte de la salle de bains claque légèrement, en même temps que la réalisation dans l’esprit de Rye ; une de celles dont il aurait tout aussi bien pu se passer, vu la douleur qu’elle lui inflige. Dans un soupir, il reprend son téléphone et commence à parcourir les restaurants alentour.

Son regard se redresse automatiquement en entendant l’ouverture de la porte. La clinche qui s’agite et les bruits de pas qui s’avancent suffisent à lui faire détacher les yeux de son écran pour les poser sur Hunter, torse nu devant lui. Rye ne parvient plus à réfléchir. Si ses pensées sont d’ordinaire semblables aux branches d’un arbre, se développant dans tous les sens, donnant naissance à de nouvelles ramures en se nourrissant les unes des autres, elles se transforment soudainement en des balles rebondissantes, s’entrechoquant sans parvenir à créer quelconque lien dans son esprit. Ses yeux s’écarquillent légèrement, sa bouche s’entrouvre à peine assez pour souffler un “wow” dont il ne réalise l’échappée que trop tard. En secouant la tête, il espère remettre un peu d’ordre dans les méandres de ses pensées, mais elles ne font que rebondir encore plus, agitées et perturbées à la vue qui se dresse devant lui. “I mean–” La phrase reste en suspens, comme le temps autour d’eux. Les années l’avaient habitué à voir Hunter se détacher de ses vêtements ; entre les sorties d’entraînement, les vacances en Italie, les escapades dérobées aux yeux d’Aimee vers Brighton, les temps de préparations pour les soirées auxquelles Hunter insistait pour pouvoir l’emmener avec lui, ou les simples tranches de vie qu’ils ont partagées, Rye avait pris l’habitude de s’accorder des regards discrets vers les courbes musculaires de son meilleur ami. Mais deux ans à ne le voir qu’au travers des photos ou des vidéos qu’il repassait parfois en boucle pendant la soirée lui ont fait perdre de cette habitude, et l’ensemble de muscles sensiblement différent de la dernière fois qu’il l’avait vu – qu’il avait posé ses lèvres dessus, dévorant sa peau avec l’ardeur d’un affamé – perdure à empêcher quelconque connexion dans son cerveau. La grande inspiration qu’il prend perd en subtilité en un claquement de doigt ; non pas qu’il ait été en mesure d’en faire preuve depuis les dernières secondes écoulées. D’un geste flou de la main, entre le moulinet, le pointage de doigt et l’évidence apportée par une paume dressée vers le plafond, il s’octroie un bref instant supplémentaire avant de lâcher, presque à bout de souffle : “Your tattoo is… incredible. Like, wow. That hawk – like, obviously it’s an hawk, duh –, yeah. Wow. Very nice. The details in the wings seem to be… something else. Good one. Does it go to your back as well? Must’ve hurt as hell! I mean, you don’t have to reply, that’s fine. Yeah, beautiful, really.” Il acquiesce vivement. Une fois, deux fois, trois, puis se retient de s’insulter lui-même, dans son incapacité à faire preuve d’un semblant de contenance. “So, for tonight.” Son raclement de gorge trop intense le trahit (presque?), aidé par l’empressement de ses paroles. “I mean, the restaurant. You know. You told me to find a restaurant, while you were… Anyway. Rye se mord violemment la joue, pour tenter d’apporter un peu de contrôle à sa diarrhée verbale. “A pub. I found a pub. Clearly british. The british-iest. No snails. Or maybe outside but, you know, too cold for that right now.” Shut the fuck up, Harding. Abort the mission, abort the freaking mission! “I, uh. Need to pee before we go.” La porte de la salle de bains claque à nouveau, quelques clignements d’yeux plus tard.
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“That’s completely stupid, Hunter. We shared a bed before. We’ve slept together before, even. Ses joues reprennent leur teinte pourprée en un battement  de cœur de travers. Instinctivement, il secoue la tête, tentant de chasser les images qui lui montent à la tête. “You know what? If you sleep on the floor, I sleep on the floor too, and we’ll look like two idiots with back pain tomorrow morning.” Il aurait voulu ressembler à un leader charismatique, mais sa façon de croiser les bras sur sa poitrine lui donnerait presque des allures de scout mécontent. Un scout de quasi deux mètres de hauteur, certes, mais à la moue semblable à celle des gamins de quartiers que l’on tente d’occuper un dimanche. D’un sourcil arqué, il vient appuyer ses propos, pointant son index vers Hunter. “Don't do this to me, Wayne. I haven't been able to practise lately and you know my lumbars can be quite capricious. You don't want to hear me whine about it on our way back.” L’espace d’un instant, les deux trentenaires se toisent, avant qu’Hunter ne roule des yeux et laisse entendre un “fine” venant changer l’expression de Rye du tout au tout : sa moue renfrognée se transforme en un sourire ravi, officiellement d’avoir réussi à préserver son dos d’une nuit sur la moquette d’un bed and breakfast, officieusement de l’avoir convaincu à le rejoindre, retrouvant avec maladresse une habitude qui lui a terriblement manqué. Le silence retombe sur la chambre et, tirant les draps pour venir se glisser en dessous, le journaliste sent ses entrailles s’agiter. Le matelas s'affaisse légèrement sous le poids d’Hunter et les ressorts se mettent à grincer sous leurs mouvements, métronomes des battements erratiques du cœur de Rye. Allongé sur le dos, il fixe l’obscurité, n’osant qu’à peine respirer de peur de troubler le silence retombé sur la pièce. Ses pensées dérivent malgré la fatigue aussi mentale que physique. La dernière nuit passée aux côtés de Wayne le frappe de plein fouet et, sous ses doigts, il a l’impression de sentir à nouveau la moiteur de sa peau. Même ses dents, plantées dans l’intérieur de ses joues, ne parviennent pas à faire preuve d’ancrage dans la réalité. Les souvenirs beaucoup trop vifs de leurs corps qui s’entrechoquent et se découvrent, avides et empressés, lui donnent le tournis malgré sa tête enfoncée dans son oreiller. S’il hume suffisamment fort, l’odeur de sa peau revient hanter ses narines. S’il se concentre un peu trop longtemps, il parvient à retrouver le goût de son derme sur le bout de sa langue et de ses lèvres. Comme un écho lointain, les gémissements résonnent dans le creux de ses oreilles, chatouillant ses sensations en diffusant une vague de frissons qui lui arrache un soupir. Le besoin de lui ne s’apaise pas via leur proximité, bien au contraire. Son être tout entier cri, halète, supplie pour retrouver le sien, envoyant valser les convictions qu’il a tenté de s’inculquer en s’éloignant de lui. Embourbé dans son insomnie, Rye sent passer les premières heures de la nuit sans parvenir à calmer les battements de son cœur ni les conjurations de son esprit. Guidé par la fatigue autant que la nécessité de le sentir près de lui, il laisse son dos quitter le matelas pour se glisser sur son flanc, sa vision habituée à l’obscurité lui permettant de détailler les contours de l’épaule dessinée de l'athlète. Dans le râle du matelas, il se rapproche doucement et vient glisser son bras autour de la taille de son ami. Sa peau effleure la sienne, avant de l’enlacer de cette tendresse qu’il n’a jamais su accorder à qui que ce soit d’autre. Les papillons s’envolent dans son estomac en même temps que cette pointe d’anxiété qui le suit depuis l’extinction des feux, balayés par les doigts d’Hunter qui se glissent entre les siens. Dans le secret de la nuit, Rye esquisse un sourire, laissant la chaleur apaisante se diffuser de ses muscles à ses veines, puis à sa poitrine. Son étreinte se resserre autour de la taille de Wayne, le torse de l’écrivain se lovant contre le dos de son ami avec l’aisance de l’habitude retrouvée. Doucement, tendrement, il pose son front contre son épaule, enivré par l’odeur de sa peau et le rythme de sa respiration sur laquelle la sienne se calque. Chaque nouvelle expiration vient mourir contre le dos de l’athlète, que les lèvres de Rye effleurent au moindre mouvement, même à peine perceptible. L’endroit n’importe plus. Que ce soit dans l’intimité d’un bed and breakfast entre Londres et Eastbourne, dans le manoir des Wayne ou la maison imposante d’Aimee Harding, dans un hôtel à l’autre bout du monde ou l’appartement de l’un ou l’autre, la sensation aurait été la même. Dans l’étreinte de leurs corps, Rye est de retour chez lui après deux ans d’errance.

Pour la première fois depuis suffisamment longtemps pour qu’il puisse prétendre ne pas se rappeler quand, Rye a bien dormi. Bercé par la respiration d’Hunter sur laquelle la sienne se calquait et rassuré par la proximité de leurs corps, il a fini par plonger dans un sommeil reposant malgré la courte durée de leur nuit, de ceux qu’il ne parvient plus à invoquer seul. L’insomnieux a trouvé son repos, les narines emplies du parfum subtile de l’athlète et un sourire discret étendu au coin de ses lèvres. Il aurait voulu rester là. Profiter de cette parenthèse dans un quotidien peinant à s’habituer à l’absence d’Hunter, porté par l’illusion que tout pourrait redevenir comme avant. Son cœur s’agite toujours autant, pourtant. Rye a voulu prendre ses distances pour apprendre à le dés-aimer, mais deux ans passés loin de lui n’ont fait que nourrir les sentiments qu’il éprouve à son égard, et ce creux dans ses entrailles lorsqu’il n’est plus dans sa vie – un puit sans fond, un tonneaux creux que rien ne parvient à remplir, dont les parois s’effritent dans le manque constant malmenant son coeur, son esprit et son corps. D’avoir ouvert les yeux, le nez plongé dans les mèches brunes de son ami, la main serrant toujours la sienne comme si s’en détacher signifiait la fin d’un monde – son monde –, lui apporte une sensation de paix pour la première fois depuis… Depuis cette nuit-là, où il s’était endormi dans son bras, le corps haletant et les muscles chauds et douloureux, dévoré au petit matin par les premiers signes de courbatures pointant en même temps que les rayons du soleil d’été. L’angoisse reprend rapidement le dessus lorsque leurs phalanges se démêlent et que leurs corps se séparent. Incapable de le retenir, Rye soupire, saluant le prétexte tout trouvé d’un réveil avec un corps endolori pour dissimuler la vraie raison de son mécontentement. Pendant quelques minutes, il ne dit pas un mot. Assis de son côté du lit, la couverture mollement retombée sur ses cuisses, il contemple les plis et replis des draps, la forme tassée de l’oreiller sur lequel Hunter a dormi, puis relève le regard vers le dos contre lequel il a passé la nuit, s’agitant pour retrouver ses vêtements de ville. En un battement, son cœur se serre avec une douleur aiguë. Rye déteste cette idée. Leur week-end s’apprête à entamer sa dernière journée et malgré ses pensées encore troublées par un sommeil profond, cette fois c’est son tour de chercher des excuses pour prolonger d’encore plusieurs heures leur périple. Londres n’est plus si loin et le chemin n’est pas bordé par des suffisamment de merveilles pour étirer le temps à l’en rendre élastique. Au moins, les gargouillis sonores de leurs ventres lui donnent une première excuse de fuir la vélocité d’un retour pressé. “The reviews say their breakfast is amazing. Let’s give it a try?”

L’odeur du gel douche de l’auberge lui monte aux narines et déjà, il regrette celle l’ayant accompagné toute la nuit. Sa moue renfrognée dissimulée derrière le menu, ses yeux parcourent la carte mais son esprit est bien incapable de se concentrer. Par-dessus les rebords plastifiés, son regard cherche les traits d’Hunter, dont les sourcils s’arquent lorsqu’il croise le sien, poussant Rye à se dérober et se racler la gorge. “I’m thinking about the veggie breakfast. Seems good.” Il s’empresse de souffler, acquiesçant avec un peu trop de ferveur pour gagner en crédibilité. Le rose sied tellement à ses joues qu’il ne les quitte plus depuis la veille. A peine Wayne repose-t-il sa carte que le serveur vient prendre leurs commandes, le pas pressé mais le sourire accueillant au détour de ses lèvres. En le détaillant, Rye constate qu’il a l’air un peu nerveux, le regard oscillant entre son calepin et le visage d’Hunter. Une bouffée de jalousie s’imprègne de l’auteur. Comme une pointe enfoncée dans sa poitrine, elle se fait douloureuse et insidieuse, colorant un peu plus encore le derme partiellement caché par sa barbe. Luttant avec toutes les forces qu’il parvient à trouver pour ne pas rouler des yeux, il finit par souffler sa commande avec un agacement à peine perceptible. “And I’ll take a hot chocolate, too.” Le garçon s’apprête à s’éloigner quand Hunter l’intercepte, faisant hausser les sourcils de Rye. “Make sure there’s no cinnamon. At all.” La poitrine d’Harding se tord dans tous les sens, sous les tressaillements de son cœur. Son sourire idiot se dessine sur ses traits, faisant naître un printemps de couleurs sur son teint. Hunter se souvient et Rye, torturant un peu plus son esprit, se demande si c’est un vieux réflexe remonté à la surface ou s’il y pensait déjà avant. Dans un souffle, il lance un thank you, sans se défaire de l’expression béate collée sur son visage. “I don’t want you to die on me. I can’t deal with your mom.” Le rire de l’artiste ponctue le roulement d’yeux de l’athlète, dont le visage s’éclaire d’un fin sourire, avant que la conversation ne s’élève à nouveau entre eux et que le repas ne se déroule sans accroc. Les minutes passent et s’étirent, jusqu’à se transformer en heure. Autant de temps durant lequel leurs assiettes commencent à refroidir, Rye glissant entre ses lèvres une des centaines – si ce n’est plus – de questions qu’il se pose quant à ses voyages, ses découvertes, ses souvenirs forgés pendant tout ce temps, dont il n’a entendu que des bribes racontées par Nehara et ce que les vidéos d’Hunter veuillent bien montrer. Trop occupé à l’écouter bien plus qu’à manger, il s’est retrouvé, à plusieurs reprises, le menton posé dans le creux de ses mains et le regard avide d’en savoir plus, délaissant ses champignons et ses hash browns pour se laisser porter par le timbre de l’aventurier. Lorsque leurs couverts se croisent finalement sur la céramique vidée de ses aliments, Rye hésite un instant, s’humectant les lèvres avant d’agiter maladroitement son index vers son face à face. “You’ve got a bit of crumbs just like– No, nope, not there, it’s a bit higher but– No, more on the left– Wait.” Sans qu’il n’y réfléchisse, sa main se tend et, du dos de ses phalanges, il vient retirer la miette, s’attardant un peu trop longtemps contre sa peau, le regard plongé dans le sien. Une chaleur familière se répand dans ses muscles, dérangée par la peur de faire fuir Hunter. Lentement, sa main s’éloigne et Rye esquisse un sourire maladroit. “Yep. All set now.”

Le manque commence à se faire ressentir à peine sortent-ils du bed and breakfast, leurs sacs sur les épaules avant de les laisser retomber dans le coffre de la Defender. Mêlé à une appréhension pernicieuse, il fait résonner un tic-tac désagréable dans la tête d’Harding. Le temps lui manquera bientôt, et il n’a aucune foutue idée de la prochaine fois qu’il pourra passer du temps avec lui. Les questions se réveillent, propulsées par le sucre du chocolat chaud et l’adrénaline causée par l’anxiété : et si c’était la dernière fois qu’ils passaient du temps ensemble? Et si Hunter voyait ça comme une bonne façon de conclure une histoire après une séparation trop brutale pour être réelle? Et si ce week-end était la dernière chose à laquelle Rye pourrait se raccrocher après aujourd’hui? Une boule de nerfs et d’angoisse vient obstruer sa gorge. Nerveusement, ses doigts se tordent, s’emmêlent, comme s’ils cherchaient désespérément à recréer la sensation de ceux d’Hunter dans leurs interstices. La petite voix insidieuse dans l’esprit de Rye lui murmure de faire quelque chose, n’importe quoi, pour stopper un peu plus encore le processus d’écoulement du temps ; ou s’il continue à s’égrainer, qu’il parvienne à les oublier, les abandonnant l’un à l’autre sans que leurs responsabilités ne remontent à la surface. “If you turn on the right, there’s a nice botanical garden.” La voix de Rye recouvre soudainement la musique – une playlist des années 80, spécialité de Wayne, qu’il connaît encore par cœur pour l’avoir entendue presque à chaque trajet fait à ses côtés. Avec incertitude, il s’humecte les lèvres et force un sourire faussement confiant. “Unless you’ve got plans, it could be the occasion to visit it? Tickets are on me. You can’t say no to that, right?”
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La voix douce de Richard Marx finit par le tirer de son sommeil. Sa tempe est froide, sa nuque sensible. Peinant à ouvrir les yeux, Rye cherche à comprendre où ils peuvent être au travers des sensations ; la plus inquiétante, c’est celle de la voiture à l’arrêt. Instantanément, ses sourcils se froncent et son dos se redresse dans un grognement. Lentement, il se frotte les yeux avant de cligner à plusieurs reprises, regardant brièvement autour de lui puis se tournant vers sa droite. C’est infaillible, cette facilité avec laquelle la vision d’Hunter parvient à faire naître son sourire sur la commissure de ses lèvres, peu importe son niveau de fatigue. “Hey,” il souffle à peine, se mettant à froncer les sourcils lorsque son regard se pose sur la ruelle. Son cœur dégringole dans sa poitrine, sous le poids d’une déception qu’il n’essaie pas de cacher. “Oh.” Well fucking done, Harding. You really had to fall asleep, didn’t you? Les regrets l’envahissent comme un tsunami reçu en pleine figure. Tristement, il baisse le regard, sans tendre la main vers la poignée de la porte. Il attend. Sans savoir quoi, ni combien de temps est-ce qu’il restera là sans bouger, il espère quelque chose – n’importe quoi, un signe, un indice que tout ne se finit pas comme ça. Pas quand ils ont encore tant de choses à vivre ensemble ; il en est persuadé, malgré l’ironie de son départ et son besoin si intense de rester près de lui. “Well…” Rye tourne les yeux vers la droite, sans grande assurance. Un sourire, entre timidité et hésitation, se glisse sur ses lèvres à l’entente de la remarque. Nice n’est même pas proche de ce qu’il a pu ressentir, pendant ces dernières quarante-huit heures. Mais au vu de comment leurs retrouvailles ont débuté la veille, Harding s’estime heureux d’y avoir droit. Doucement, il acquiesce. “Thank you for those two days. I’m glad I’ve got to spend them with you.” Son expression se mue doucement, marquée d’une pointe de tristesse qu’il tente de noyer, papillonnant des cils un bref instant. “Have a good night, yeah? Rest well.” Il ne sait pas s’il invente le léger tremblement dans sa voix ou si Hunter parvient à le percevoir aussi. Dans l’obscurité de la petite ruelle, éclairée principalement par le néon tremblant de l’off-licence au-dessus duquel Rye s’est installé, il se permet pourtant un dernier sourire, porté par l’espoir que la remarque d’Hunter fait naître en lui. L’élan prend le contrôle de ses muscles et doucement, Rye se penche et vient déposer un baiser rapide sur la joue de l’athlète. “I’ll text you, if that’s fine.” La question qui n’en est pas réellement une reste en suspens, alors que ses doigts ouvrent enfin la portière et qu’il se dégage de l’habitacle – d’abord par une tentative infructueuse, toujours accroché à son siège par sa ceinture –, contournant la carlingue pour aller récupérer son sac dans le coffre et s’éloigner un peu ; suffisamment pour pouvoir adresser un signe de la main en direction de son ami. Dans le brouillard de son esprit et l’obscurité de la nuit, Rye est sûr d’une chose : il ne peut pas laisser les choses se finir ainsi.



 
— not everything is a poem, Blythe, my mother scoffs. I laugh because I am certain everything is a poem if you catch it in just the right light, like a crystal.